mardi 25 mars 2008

C'est l'homme

Deux choses sont essentielles pour vivre :
Savoir qu’on peut être aimé
Savoir qu’on va mourir

Tout le reste se rapporte, avec moins d’intensité, à ces deux conditions. Celui qui les intériorise toutes les deux, celui-là vit heureux et à l’abri.

On pourrait dire également :
Savoir qu’on peut aimer
Savoir que les autres mourront

Mais cela nous enferme dans un carcan de désespoir, de défaitisme. Nous abrite d’un péril et nous expose à un autre.

Il faut sinon comprendre celle-là, plus complexe :
Savoir qu’on peut être l’autre

Et là, tout est dit.

pourtant

mardi 26 février 2008

écrit dans l'alcool

aux confins de la nuit, j'entends
braire l'âne et l'éléphant
mais les visions de mon âme
n'égalent pas ta voix à laquelle je me pâme
pourtant à la frontière étroite de mes sens
je perçois infinie, pure et pourtant sans
vérité ton souvenir comme un vieux rêve
dessiner dans mes yeux l'amitié qui se lève
et, transfuge aux échos d'un bel et tendre amour
je meurs à ton image, enfin, mais sans retour

samedi 12 janvier 2008

ô ma Clémence

je t'aime je t'aime je t'aime ô ma Clémence
tu ne sais pas à quel point, et combien je t'ai aimé, et comme tu avais creusé dans mon coeur un espace réservé à toi, comme tu avais modelé mon coeur en fonction de toi

maintenant la place est vide, désespéré mon coeur se projette vers toi. avant, quand tu m'aimais aussi, il trouvait une réponse, un écho, mais maintenant le silence brise son cri terrible.

ô ma Clémence, tu as pris une telle place en moi, comment puis-je imaginer vivre sans le contact permanent avec ton âme, comment puis-je vivre coupé de toi?

lundi 25 juin 2007

Lille

Il me faut maintenant partir. Prendre un chemin que je veux sans retour. Je ne dois pas me retourner, car le passé m'attire et m'absorbe, il me dévore...

Lille, O Lille! Tes cheminées de briques s'élevant au-dessus de ton épaisse et sombre silhouette, te confèrent une beauté si brutale! Lille, O Lille! Que faut-il pour te séduire, dois-je verser mon sang dans le réceptacle de tes rues infectes? Dois-je apporter ma tête en dépôt de ma fidélité, la jeter aux abîmes, et précipiter mon corps à sa suite?

Image infâme de la ville cosmopolite où s'entremêlent les conditions les plus ignobles, Paris n'offre aux jeunes âmes qu'une soif inextinguible de vie... qui les achève. Métropole mortifère où dégénèrent les meilleurs corps, la meilleure vie, je te hais!

Lille, O Lille! Tu verses la vie aux assoiffés avec l'excès des bienfaiteurs exaltés! La vie, l'amour de la vie, se reflète dans la teinte pourpre de tes millions de briques, dans tes cheminées qui, telles d'immenses temples phalliques, invitent à faire exploser la vie! Les vapeurs de vin s'élevant dans tes ruelles le soir se mêlent à l'âpre exalhaison des haleines enivrées, et composent un parfum qui m'est doux...

Lille, O Lille... Salut de ma Khâgne!

dimanche 8 avril 2007

Vingt ans

Le vieillard envieux de nos jeunes visages
Et de nos muscles vifs, et de notre vigueur,
Et de nos fols éclats dont nul ne tient rigueur,
Murmure: "Tel je fus, lorsque j'avais leur âge!"

Et de sortir sans joie du coffre de sa vie
Quelque vieux souvenir, terni et poussiéreux.
"J'avais vingt ans! c'est loin, c'était des temps heureux
C'était des temps de fête! jeunesse, on t'a ravie!"

Ainsi gémit l'aïeul, comme le pauvre cygne
Au crépuscule blanc de ses jours engloutis.
Misère des vieux coeurs où tout coeur aboutit!
A ces affres morbides leur âge les assigne...

samedi 24 février 2007

Ode à un médiocre professeur

Imaginerait-on les plus grands célébrés
Par un fat, par un sot, par un coquin lettré?
Pourtant dans un collège, ma foi fort respectable
Enseigne par erreur un drôle abominable
Qui, par toutes les voix de l'endroit consacré,
Veut sacrifier les Lettres à sa médiocrité.
Par lui tous sont passés, pas un n'a survécu;
Le nombre des victimes sans cesse s'est accru.
Une stèle en un lieu célèbre leur mémoire,
Ainsi que du faquin le sinistre grimoire.
La liste, hélas, est longue, et un oeil averti
Reconnaît aisément les noms dessus sertis:
Lhermite, Baudelaire, Ionesco, Racine
La Bruyère, Balzac, Maupassant, Lamartine
Beaumarchais, Aragon, Stendhal, Victor Hugo
Musset, Ronsard, Prevost, Proust, Céline et Rimbaud!
La liste est longue comme notre littérature,
Des génies que le monstre s'offrit en pâture.
Mais sur le monument de marbre et de granit
Grimpe comme le lierre, verdoyant parasite
Une liste innombrable de noms inconnus,
Sacrifiés sur l'autel de la bête cornue.
Car le monstre assoiffé qui commet ces carnages
De génies, de poètes, en bon anthropophage,
Prend des hypokhâgneux pour son apéritif,
Et en reprend encore, parfois au digestif!

Combien d'étudiants et de vocations
Devront encor subire cette persécution?

jeudi 22 février 2007

Chimères assassines

Ah! Que je souffre!
O mon ami,
Vois-tu le gouffre
où je gémis?

Ecoute dans ton âme
Les pleurs d'un coeur déçu,
Prisonnier des flammes
A tout jamais déchu!

Ma liberté, je l'ai perdue
En entrant dans cette prépa;
Ma jeunesse, je l'ai vendue
Moi non plus je ne savais pas!

Tout jeune alors, j'avais de la jeunesse
L'enthousiasme et l'âpre passion;
Si jeune, hélas, j'avais cette faiblesse
De croire en l'homme, en sa compassion!

Les maudits m'ont vanté leurs études frivoles,
Pour attirer à eux l'innocent lycéen;
"Regarde, mon enfant, où mène cette école:
Aux Gloires éternelles, au céleste Examen!"

J'ai contemplé le mirage admirable,
Et j'ai saisi la main qu'on me tendait;
Que n'ai-je vu la serre épouvantable,
Qui dans l'abîme atroce m'entraînait!

Seul dans la nuit, je m'écrie:
"Où est le jour? où est l'espoir?"
Le silence me terrifie
Comme le vent, glacial et noir.

J'ai brûlé la chandelle
Trop vite, et j'ai payé
Une peine éternelle
Pour un rêve insensé!

Si je t'inspire
Un peu d'émoi,
Fuis donc le pire:
Fuis la prépa!

Point de vue

Le soir tombe et déjà les ténèbres me pressent,
Dérobant à mes yeux le spectacle enivrant
De la vallée muette à laquelle je laisse
Ces heures solitaires, ce bonheur en suspens.

Je promène un regard absent sur ce spectacle
Qui s'offre en démesure à mon âme ébahie,
Recueillant force et calme dans ce réceptacle
Des beautés de l'automne avant le froid, la nuit.

Alors que nostalgique et transi je repars
Quittant ce point de vue des beautés vespérales,
J'entends au loin tinter, comme pour mon départ,
Les cloches d'angélus au silence fatales.

Du refoulement littéraire et poétique en particulier

Une foule de choses assiège mon esprit
Que je ne sais transcrire, par manque de génie
Et aux portes scellées de mon inspiration,
S'entassent ces rebus, pleins de frustrations!

Quand par hasard s'entr'ouvre la porte toujours close,
C'est alors la débauche des vers et de la prose
Et je renonce, honteux, à coucher sur le blanc
Ces lignes que la Muse m'inspire en un élan!

Mais parfois acculé par la masse grouillante
Des vers impatients,
Je les vomis sur feuille, ô masse épuisante,
Bien maladroitement!

Ballade urbaine

Dans le chaos immense de la Révolution,
Dans les tas d'innocents expirant en un râle,
Dans les âcres volutes gerbées par les canons,
Dans le coeur de Paris, sanglante capitale!

Des félons apatrides, ennemis de la France
Substituant à Dieu l'idole de la Mort
Accomplissent en choeur l'ancienne vengeance
Du Monstre aux yeux d'airain qui jamais ne s'endort.

Le sang coule, aigre fruit de leur égarement
Récolté au fusil dans des bruits de tonnerre,
L'inconscience humaine ainsi transfigurant
L'essence de la vie en carburant des guerres!

Je m'avance, oublieux de la mort et du bruit
Ne songeant point à moi mais à l'humanité
Qui dans ces boulevards, de jour comme de nuit
S'enfonce encore un peu sous notre iniquité!

Enfances

Dans un bois de Champagne isolé et charmant,
Repose le hameau de ma plus belle enfance:
Quelques maisons de pierre où le lierre s'élance,
La mare verte et tiède, le jardin des enfants.

Dans ce lointain refuge ou ce havre dormant,
J'ai connu le bonheur, ignoré la souffrance;
Nous avions des bois l'étroite surveillance
Quand nous jouions; son silence en nous endormant.

Mais la grande nuit tombe et je perds la mémoire
Mon passé comme un rêve me hante et me fuit
Que me font les honneurs, la fortune et la gloire

Quand le meilleur de moi gît au fond de la nuit!
Ah! souvenir, restez! sans vous je suis perdu
Votre éclat me guide jusque dans l'inconnu...